
Des fois, l’inspiration ne vient pas. J’ai, après tout, longuement râlé sur ce blog depuis quinze mois, scribouillé plus de 60 textes (et oui), réfléchi à tort et à travers mais en ayant souvent raison (laissez-moi au moins cela, pitié).
Une bouteille à la mer lancée sur mon Instagram et me voilà lancée.
Les fesses, donc.
Tout le monde en a. Plates, bombées, musclées, flasques, velues, douces, sèches, tombantes, hautes placées, à fossettes, moelleuses, pointues. Les autres animaux nous envient sûrement cet attribut corporel : qu’est-ce que les dauphins peuvent bien mater sous l’océan lors de leurs verres en terrasses ? Les coraux ? Les nageoires ?
Pour nous confirmer que la Terre tourne bien autour de ces deux sphères, il suffit juste de taper « fesses » sur Internet et très vite, les articles tombent, les uns après les autres. Hélas, il ne s’agit en réalité que de brèves peu intéressantes : xxx offre une vue imprenable sur ses fesses, xxx offre un gros plan sur ses fesses, comment avoir des fesses galbées… Tous ces papiers concernent l’exhibition et la qualité du postérieur des femmes. Ce que je trouve quelque peu regrettable : je ne cracherai pas sur une chronique faisant l’éloge des fesses de Brad Pitt (souvenez-vous de Troie, navet cinématographique mais plaisir des yeux par instants).
Mes potes mecs hétérosexuels posent leur regard sur les fesses de leurs dulcinées ou coups d’un soir. « Je veux qu’elle ait un beau cul », un mantra entendu longuement autour de pintes et de mojitos.
Les seins ? Les quoi ? Bizarrement, l’intérêt est moindre. La faute au porno, j’imagine, aux fameuses levrettes où l’homme fesse allègrement sa partenaire. Mâles alphas de mes ovaires.
J’avoue ne pas comprendre l’enthousiasme sur la chose – les fesses ne sont pas la partie la plus expressive de notre corps pour verbaliser une émotion. Mais c’est moi, j’imagine, et ma passion vérité incessante. Ca me perdra (ça me perd déjà).
Bref. Le monde tourne autour des fesses et pour pécho, il devient plus important d’avoir un boule rebondi qu’un peu de conversation.
Elles peuvent être bien évidemment sources de complexes : elles sont souvent trop ou pas assez. On les compare avec celles de nos copines et on filerait un rein, sans hésiter, pour être dotée de leur postérieur (Pauline, tu es bien sûr ici visée).
On s’emmerde à faire des squats, à se ventouser allègrement la cellulite avec notre Cellucup car cette saloperie typiquement féminine va bien évidemment se nicher ici bas.
On achète un jean ? On vérifiera qu’il nous moule comme la Vénus de Milo et tant pis s’il nous fait des poteaux à la place des cuisses. On veut un boule, bébé. Un gyrophare dans une fringue.
On prend des cours pour twerker – cette danse étonnante où l’on secoue les fesses sur un rythme démentiel. Curieuse, j’ai essayé : je crois que je ne me suis jamais trouvée aussi ridicule de ma vie. Et pourtant, la honte, ça me connaît : je me casse la figure régulièrement, je gaffe, j’écris à tout mon répertoire quand j’ai trois grammes dans le sang.
Je twerke donc devant mon miroir. Je me regarde. Comment une danse voulue sensuelle me transforme en Tadmorv énervée feat un chien sexagénaire qui tente de s’accoupler ? (L’image est pour moi, c’est cadeau).
J’ai hésité pendant un temps à me filmer et à envoyer cette vidéo à tout mon entourage pour ensoleiller leur journée mais je me suis dit que je ne me relèverai jamais si, un jour, la vidéo quittait les réseaux cryptés de WhatsApp, Messenger et Instagram.
Dieu m’a filée l’écriture – on verra pour le reste lors de la prochaine réincarnation.
Certaines iront même jusqu’à réaliser une opération au nom charmant : le Brazilian butt lift. Oui, oui. On prend de la graisse d’autres parties du corps (ventre, cuisse, mollet, nez) et hop, tour de magie ! Tout ce beau monde finit dans le postérieur et rend celui-ci plus harmonieux à un prix accessible : 8000 balles.
On a ça et on a toujours pas de vaccin contre le cancer ? Intéressant. Ca en dit long.
On les regarde donc. On les maudit. On les apprécie. On se flagelle lorsqu’elles sont trop grosses (respirez : il vaut mieux être dotée d’un popotin rebondi qu’un ventre replet d’un point de vue cardiovasculaire). On leur inflige des strings ficelles (je ne comprends pas. Hygiène, hémorroïdes, hédonisme, un tanga ou un shorty feront tout aussi bien l’affaire que ce vulgaire filet à provisions nous sciant l’anus). On les crème à n’en plus finir. On nous les fesse. On les garde comme arme ultime lors d’une nuit.
Derrière chaque femme se trouve une paire de fesses.
J’aurai pu m’arrêter là tellement je trouve cet axiome génial et absurde mais non, reprenons. Derrière chaque femme se trouve une paire de fesses qu’elle adore ou déteste, en fonction des jours. La société ne nous aide pas forcément à les accepter et à leur dédier des chansons d’amour tous les jours.
Un des plus gros succès musicaux de l’année 2020 contient quand même les phrases suivantes « J’t’ai vue passer dans l’allée, ton boule me rend romantique, pièce / Il fait des appels de phares quand il bouge de gauche à droite, j’suis obligé de réagir« .
J’ai toujours rêvé qu’on m’aborde comme cela dans la rue. Il est temps d’avouer. Ca me permettrait de répondre, avec un grand sourire : mon boule fait des appels de phares ? Et toi t’as une bonne tête de radar.
Peut-être qu’un jour, on nous draguera de la sorte : « la courbe de tes fesses fait le tour de mon chibre » ou encore « tu es une femme callipyge et je suis un pygophyle certifié » (vous les voyez les mots compte double au Scrabble ?).
Fesse reste un mot honni mais où de nombreuses expressions existent et peuvent nous permettre de briller en société.
Exemple choisi à utiliser lors de vos prochaines terrasses :
– Jean-fesse, cesse donc de faire ton fesse-maille : paye ton coup, on est entre fesse-pinte ici.
Propre.
En conclusion, voir les fesses sous-entend que l’on nous tourne le dos. Et personnellement, je préfère que l’on me regarde bien en face.
Les québécois disent « coupe-crotte » pour un string, je crois que tout est dit (je préfère les tangas aussi…). Perso j’adore mon cul, mais s’il était plat sans doute l’aimerais-je moins ? 😞
J’aimeJ’aime